D’abord Dieu dit à son prophète Isaïe : « Annonce à mon peuple son crime, à la
famille de Jacob ses péchés ». Et on dirait que Dieu se reprend
puisque tout de suite. Après leur avoir fait des reproches, il voit au
contraire le bien qu’ils font : » C’est
moi qu’ils recherchent jour après jour, ils veulent connaître mes chemins,
comme une nation qui a pratiqué la justice, et qui n’a pas négligé le droit
institué par son Dieu. Ils se renseignent auprès de moi des lois justes, ils désirent être proches de
Dieu ». Il y a comme une opposition entre ces versets 1 et 2. Comment
expliquer cela ? En fait c’est vrai que le peuple a beaucoup de péchés et
même de crimes, comme Dieu le dit. Mais Dieu ne veut pas s’attarder aux péchés,
aux mauvaises choses, ou au mal que les gens font. Il voit le désir de leur cœur, comme Jésus le fera avec la prostituée, quand Il dira à Simon le
pharisien : « Tu vois cette
femme, il lui sera beaucoup pardonné parce qu’elle a beaucoup aimé » (Luc
7,47). Comme Dieu le Père lui-même, le père de l’enfant prodigue (Luc 18),
Jésus ne voit pas le mal que nous faisons, Il voit le désir de notre cœur de
faire le bien. Et Il nous aide à y arriver. Cela est très important dans notre
vie. Trop souvent nous voyons les défauts des gens. Nous voyons les mauvaises
choses qu’ils font, au lieu de voir leurs qualités, et les bonnes choses. Si
l’on ne fait pas cela, d’abord on est malheureux parce qu’on voit le mal
partout. Ensuite on ne peut pas s’entendre avec les autres. En tout cas c’est
très difficile. Entre mari et femme, si on ne s’admire pas, on ne peut pas
vivre un amour qui dure. C’est très difficile d’éduquer nos enfants. Mais Jésus
nous dit : « le plus grand dans
le Royaume, c’est l’enfant...Et si vous ne devenez pas comme des enfants, vous
n’entrerez pas dans le Royaume des cieux » (Mat 18,10+19,13). Il faut apprendre à admirer les
enfants, et à voir les bonnes choses qu’ils font. C’est vrai aussi, avec tous
ceux qui nous entourent. Notre travail de chrétien, ce n’est pas de
culpabiliser les gens, de venir avec des tas de commandements, ni de leur
dire : » il ne faut pas faire cela c’est interdit, ce n’est pas bon,
c’est mal, c’est un péché ». Il s’agit au contraire de faire naître en eux
un grand désir, le désir d’aimer et de réussir sa vie, de choisir un idéal et
d’agir ensemble. Cela nous demande à regarder
les autres, avec les yeux de Jésus Christ lui-même, et de faire attention à
ce que nous disons, et à ce que nous faisons. Lorsque nous nous trouvons en
présence du mal, au lieu de critiquer les gens et de les décourager, il vaut
mieux de voir ensemble d’où vient ce mal, quelles sont ses causes, et comment
nous allons agir pour que les choses changent. C’est ainsi que nous pourrons
nous libérer du péché.
Tout cela nous amène à nous demander quelle idée
nous avons de Jésus Christ. Souvent, nous voyons Jésus Christ comme un
enseignant, qui nous a montré le chemin de Dieu par l’Evangile. C’est vrai que
personne n’a parlé, ni enseigné comme cet homme. Nous sommes sensibles aussi à
Jésus qui guérit les malades et les infirmes, qui donne à manger au peuple qui
a faim. Et c’est vrai que personne n’a
jamais aimé comme cet homme-là. Et qu’Il peut nous dire : "aimez-vous les uns les autres, comme Je vous
ai aimés". Mais nous voyons peut-être moins souvent Jésus comme l’homme juste et le Libérateur. Et
pourtant toute sa vie, Il a défendu les pauvres et les petits, Il a accueilli
les enfants alors que les apôtres les chassaient, Il a rendu leur dignité et
donné leur place aux femmes, alors qu’elles ne l’avaient pas dans la société
juive: il a défendu la femme adultère que l’on allait tuer à coups de cailloux,
alors qu’on avait laissé partir sans problème, l’homme avec qui elle avait
péché (Jean 8). Il rend la dignité à la prostituée, alors que Simon l’humiliait
et voulait la chasser (Luc 7,36). Jésus lui, voit non seulement son désir de
changer, mais son besoin d’amour. Il a aimé tous les gens, même les pécheurs,
comme les publicains ou Zachée (Luc 19). Il a aimé les étrangers sans problème.
Il les a même pris en exemple comme cet officier romain, un païen, un étranger,
en plus un officier de l’armée coloniale romaine qui avait certainement tué
beaucoup de juifs. Et pourtant Il le propose en exemple. Et aussi le femme
syrienne (Marc7,26). Jésus a relevé les pauvres et les petits. Il dit à la veuve de Naïn : "ne pleure
pas", et Il lui rend son fils (Luc 7,11).
C’est cela la première chose que nous avons à
faire tout au long de notre vie chrétienne : lutter pour la justice, dans les petites choses de chaque jour,
faciliter la vie des gens, ne pas critiquer, aller vers l’autre, voir le
positif, chercher à se mettre à la place des gens, leur permettre à nouveau de
vivre en paix avec les autres. Comme Jésus quand Il guérit le lépreux. Ce n’est
pas seulement parce qu’Il est bon et qu’Il a pitié d’eux, qu’Il les guérit.
Mais Il leur redonne leur dignité, pour qu’ils puissent retourner vivre en
famille, et avoir leur place dans la société -Mat 8,2). C’est pour cela qu’Il
leur demande d’aller d’abord se présenter aux
prêtres.
Au niveau de la religion, cela veut dire aussi ne pas mettre des fardeaux inutiles sur le dos des gens. Nous
venons trop souvent avec nos commandements, nos interdits, et nos habitudes, en
disant: " il ne faut pas faire ça, ce n’est pas bon, c’est mauvais, c’est
interdit, c’est un péché". Nous venons avec nos commandements, mais les 10
commandements, les gens les connaissent déjà. Même nos ancêtres les
connaissaient. Nous n’avons qu’un seul
commandement, c’est d’aimer, d’aimer comme Jésus, d’aimer avec Jésus, et
d’aimer grâce à Jésus. « Jésus notre chemin, notre vérité et notre vie
" (Jean 14,6). Au lieu de libérer les gens, trop souvent nous les
écrasons.
-Après la
justice, la charité :
"Partage
ton pain avec celui qui a faim, accueille chez toi le pauvre qui n’a pas de
maison. Si tu vois un homme nu, tu lui donnes des habits. Ne refuse pas celui
qui est ta propre chair". Tout homme et toute femme, quel qu’il
soit, c’est ma propre chair. Même s’il est méchant, même si c’est un étranger
que je ne connais pas, le rejeter c’est me rejeter moi-même. C’est me tuer
moralement et psychologiquement. Et en même temps, c’est rejeter Jésus qui nous
dit : "tout ce que tu fais au
plus petit de mes frères, c’est à Moi que tu le faits". Nous avons
noté combien cela est difficile. Ce n’est pas facile de savoir comment aider
vraiment les gens, de la meilleure façon possible. Nous savons qu’il y a des
gens qui nous trompent, et qui veulent profiter de nous. Jésus ne nous demande
pas d’aider les paresseux, mais au contraire de leur donner du courage. Mais
aussi de les former et de leur donner
les moyens d’agir. C'est cela le travail de la Caritas, et non pas
seulement distribuer de la nourriture ou des habits. C’est cela aussi notre
responsabilité. Ne pas seulement donner à la Caritas, des habits dont nous
n’avons plus besoin parce que nous les avons trop portés. Ne pas seulement
faire l’aumône. D’ailleurs faut-il faire l’aumône à chaque fois, lorsqu’on
sait, par exemple, que ce que l’on donne aux talibés ils ne pourront pas en
profiter, car ils sont exploités. Et que l’argent et même la nourriture, le
sucre par exemple, qu’ils ramènent sera récupéré par les marabouts de leurs
écoles coraniques. On peut se réjouir à ce niveau, de ce qu’on commence à se
poser vraiment la question de ces écoles coraniques, et que l’on cherche à
trouver des solutions.
Quand quelqu’un vient me voir et me demande
quelque chose, comment savoir s’il me dit la vérité? Comment l’aider de la meilleure
façon possible? Nous sommes en réunion de CEB (communauté chrétienne de
quartier). La CEB est importante pour aider la
Caritas. Car c’est nous qui vivons dans les quartiers, qui pouvons
connaître les gens du quartier, qui en ont vraiment besoin.
Nous avons noté que les gens les plus pauvres, les plus fatigués, la Caritas ne les rejoint pas.
Ces gens-là ne viendront jamais nous demander de l’aide, parce qu’ils ont été
trop souvent humiliés et rejetés. S’ils sont malades, ils n’ont même pas le
courage d’aller se faire soigner au dispensaire. Ils n’enverront jamais leurs
enfants à l’école parce qu’ils ont trop honte. Et ils ne pourront pas leur
payer la tenue ni les fournitures. D'ailleurs ces enfants doivent se
débrouiller eux-mêmes en travaillant ou en mendiant, pour gagner un peu
d’argent et un peu de nourriture, que leurs parents ne peuvent pas leur donner.
Si nous sommes chrétiens, nous sommes aussi des citoyens. Notre charité ne doit pas se
limiter à l’Eglise, ni à l’aumône. Nous devons nous engager, pour tout ce qui
se fait au niveau de la société actuellement : pour aider les pauvres, pour
former les gens, pour leur donner du travail. En commençant par l’Acte 3 de la
Décentralisation et tout ce qu'il permet: le plan Sésame pour les personnes âgées,
les cartes d’égalité des chances pour les handicapés, les soins gratuits pour
les enfants de 0 à 5 ans, les césariennes gratuites pour les femmes qui ont de
la peine à accoucher, les bourses pour les familles nécessiteuses et surtout la
Couverture Médicale Universelle.
Ce sont d’excellentes décisions, mais souvent
elles ne sont pas mises en pratique. Et
même, elles sont détournées au profit de quelques-uns. C’est pour cela
qu’il est absolument essentiel de nous engager au niveau de nos mairies. Et
d'abord de nos quartiers avec les chefs de quartier et aussi les marraines de
quartier, les imams, les associations, les ONG, et toutes les organitions qui
sont présentes dans les quartiers. Pour faire avancer les choses, et pour que
les bonnes décisions qui ont été prises, grâce à Dieu et à la Lumière du Saint
Esprit, soient mises en pratique. Car c’est
là que le Royaume de Dieu se construit, comme nous le demandons chaque
jour"Notre Père... que ton Règne
vienne". Nous ne pouvons pas être de bons chrétiens si nous ne sommes
pas de bons citoyens, et si nous ne participons pas à la vie de la cité. Et la
première chose bien sûr, c’est d’avoir une nouvelle carte d’identité et d’être
inscrit sur les listes électorales, pour pouvoir voter.
Il nous arrivera certainement, en voulant être
charitable et aider les gens, d’être trompé. Il faut accepter de se tromper, et même que les gens nous mentent, sans nous décourager pour
autant. Il ne faudrait pas, parce que nous avons été trompés deux ou trois
fois, d’arrêter d’aider ceux qui nous entourent, en disant que ce sont tous des
menteurs. Mais soyons intelligents. Jésus nous dit : « Soyez simple comme la colombe, mais malin comme le
serpent ».Il est nécessaire aussi de savoir donner d’une façon désintéressée : laisser les
gens libres de faire ce qu’ils pensent être le mieux, avec l’aide que nous leur
apportons, et non pas ce que nous voulons, nous.
-Si nous
faisons cela, nous serons heureux. C’est cela la façon de réussir notre
vie :" ta lumière brillera
comme l’aurore, ta blessure guérira rapidement, ta justice marchera devant toi,
la gloire de Yahvé t’entourera. Et quand tu prieras, Dieu te répondra, Il te
dira : me voici". Mais
pour cela, il faut vraiment prendre au sérieux ce qu’Il nous dit. C’est pour
cela que le prophète, au nom de Dieu, reprend une deuxième fois tous ces
conseils au verset 9 et 10 : luttez contre les injustices, aidez les
pauvres, les petits, et ceux qui souffrent. Alors, la lumière se lèvera dans
les ténèbres. Pas seulement dans notre vie mais dans tout le pays. A ce moment-là, Dieu bénira notre pays: "Il fera fleurir le désert, Il donnera de la
force à nos os, notre pays deviendra
comme un jardin arrosé, comme une source qui jaillit, dont les eaux ne
s’arrêtent pas". Mais encore une fois, pour cela il s’agit de nous
engager tous ensemble, les chrétiens avec les autres, et non pas de rester
enfermés dans notre Eglise. Il s'agit de reconstruire les ruines de notre pays,
de poser des fondations solides, de relever les fondations de nos ancêtres, de garder
les valeurs sénégalaises traditionnelles, en voyant comment les vivre dans le
monde d’aujourd’hui. Alors, nous serons "ceux
qui réparent les brèches, ceux qui refont les chemins pour que la paix arrive
jusqu’à nous". Comment faire? Il faudra nous retrouver une autre fois,
pour y réfléchir ensemble. Que le Seigneur nous aide à vivre cela en
vérité.
Dieu
dit à son peuple par le prophète Isaïe (58, 3-4) :
« Pourquoi je n’accepte pas votre jeûne ?
C’est parce que quand vous jeûnez, vous
continuer à faire vos affaires.
Vous ne pensez pas à moi, mais vous pensez
à l’argent.
Vous
profitez de vos travailleurs, et vous les faites souffrir.
Vous jeûnez mais vous continuez à vous
disputer, à vous battre
et à frapper les autres méchamment.
Si vous continuez comme cela, je
n’écouterai pas vos prières ».
Isaïe (n°
6) : « Le jeûne que je préfère,
c’est de défaire les chaines injustes,
de relever ceux qui sont écrasés,
de renvoyer libres ceux qui sont
exploités et abaissés,
(les petits qui sont humiliés, et dont
vous profitez).
C’est de casser tout ce qui écrase et
fait souffrir l’homme…
Le jeûne que j’aime, c’est de partager
ton pain avec celui qui a faim.
Recevoir chez toi le pauvre qui n’a pas
de maison.
Si tu vois quelqu’un qui est nu, tu lui donnes des habits
et tu ne
refuses pas d’aider celui qui est
ta propre chair »
Isaïe
(n° 8-9) : « Si tu fais cela,
ta lumière brillera comme la lumière du jour,
tes blessures guériront rapidement,
ta justice marchera devant toi,
la gloire de Dieu te suivra.
Quand tu crieras, Dieu te répondra.
Quand tu l’appelleras, Dieu te dira me voici...
(n° 10) : » Si tu te prives de
nourriture, pour partager avec celui qui a faim,
si tu donnes à manger à celui qui est
profité et utilisé,
alors ta lumière brillera dans la nuit
et ta lumière sera pour toi comme le
milieu du jour. »
(n° 11) : » Dieu te conduira
sans cesse,
il te donnera à manger en plein désert,
il donnera la force à tes os.
Tu seras comme un jardin arrosé,
comme une source qui coule dans le
désert
et dont les eaux ne s’arrête
jamais ».
Isaie
nous dit, au nom de Dieu (n°12) : «
Si tu luttes pour la justice, on reconstruira chez toi les ruines, tu relèveras
les fondations des générations passées. On t’appellera : celui qui répare les fentes, et qui bouche les trous des murs. Celui qui
refait les chemins, pour que tout le monde puisse marcher dans la paix, et
habiter dans un pays de paix ».